Comment préparer son sol en permaculture ?

Comment préparer son sol ou son terrain en permaculture? Que ce soit pour débuter son potager, ou le rituel annuel au jardin, cette partie est certainement la plus importante! Certains disent même que le jardinier ne cultive finalement pas des légumes mais plutôt la vie du sol.

Démarrer son potager sans travail du sol
Préparer son sol ou terrain en permaculture

Transformer une pelouse/prairie en potager

La meilleure manière de débuter un potager est de partir d’une prairie dont le sol sera bien vivant! L’idéal est alors de déposer une bonne couche de foin (20 cm) dès le mois de Novembre (ou jusqu’à fin janvier au plus tard). On peut aussi mettre des feuilles mortes et des fougères. En fait, on peut mettre presque ce que l’on veut à condition que ce soit facilement accessible et assez couvrant (surtout la 1ère année quand on veut étouffer l’herbe de la pelouse). Si vous vous y prenez suffisamment en avance, vous n’aurez alors pas besoin de retourner le sol. Et ça c’est le top pour votre dos, mais aussi pour la vie du sol! En mars/avril, après avoir enlevé à la main les plus gros morceaux non détériorés qu’il pourrait rester, et un léger grattouillage de surface, votre sol sera alors prêt à être ensemencé. On peut aussi pailler avec du miscanthus dans l’idéal si vous en avez, c’est chouette car les limaces n’aiment pas trop ça paraît-il ! Ou encore avec des algues ! Si vous les disperser dès l’automne apparemment le côté salé ne dérangera pas (au contraire ça séherbe ?), et elles sont très nutritives.

Sur une parcelle venant tout juste d’être défrichée, préférez des cultures à planter/repiquer aux semis directes en pleine terre : pommes de terre (super culture “nettoyante”), tomates, concombres, courges, courgettes. Ou bien encore des engrais verts qui décompacteront le sol : trèfle incarnat, phacélie, vesce…

Sur un sol particulièrement pauvre, on peut se lancer dans la préparation de “lasagnes” végétales : différentes couches de matériaux organiques, des matières brunes/carbonées et des matières vertes/ azotées, sur une hauteur de 30 à 50 cm.

Tableau comparatif des matériaux pour le paillage du sol au potager

Connaître la nature du sol

Son pH

Les légumes préfèrent un sol légèrement acide. Vous pouvez mesurer le pH grâce à un kit vendu en jardinerie ou bien en surveillant la végétation en place, les fameuses plantes bio-indicatrices. Mais au final, ne vous inquiétez pas trop là-dessus, ça va bien pousser! Juste certaines plantes seront plus productives que d’autres en fonction du pH peut-être :

  • Sol trop acide : pour 10m² épandre 0,5 à 1 kg de cendre de bois (+10 à 30 kg de compost et 1 à 3 kg de fientes de volailles). En Bretagne les sols sont généralement plutôt acides, ce qu’on remarque à la végétation alentours: bruyères, fougères, orties, rumex, ajoncs, genêts…
  • Sol calcaire : les ajouts de compost et couvertures de foin vont acidifier le sol, on peut aussi mettre un petit peu de BFR (branches fragmentées) qui attireront les champignons et acidifieront le sol.

Attention avec ces ajouts, parfois il ne vaut mieux rien mettre que de mettre trop et prendre le risque de déséquilibrer le sol.

Sa structure

Finalement, dans le vocabulaire utilisé au jardin, ce qui fait la différence entre argile, limon et sable, est simplement la granulométrie (diamètre des morceaux de minéraux), et non sa composition (type de matière). Certains légumes préfèrent un sol très drainé, d’autre moins. Pour les carottes et panais, j’ajoutais du sable dans mon sillon avant la semis au début, mais j’ai laissé tomber, car de toutes façons j’opère une rotation des cultures!

Prenez une poignée de terre, fermez votre main pour la compacter, essayez de former une boule (vous pouvez aussi faire le “test du bocal”), voyez si :

  • ça reste bien en boule : sol plutôt argileux, il retiendra bien (voir trop?) l’eau, mais mettra du temps à se réchauffer.
  • ça s’émiette tout de suite : sol plutôt sableux, l’eau passe vite à travers, les nutriments ne restent pas, il sont rapidement lessivés, par contre ce type de sol se réchauffe plus vite au printemps.
  • un peu entre les deux, de type semoule grumeleuse : sol plutôt limoneux, c’est idéal, vous avez là un bon équilibre!

Le fait de couvrir votre de sol de foin chaque année va aider à équilibrer la structure de votre sol. Ça tombe bien, c’est le sujet du prochain paragraphe!

Préparer le sol en permaculture

À l’automne

Chaque année en Novembre, quand le sol est encore assez chaud, avant les premières gelées, couvrez-le d’une épaisse couche de foin (20 cm). Il est aussi possible de semer des engrais verts. Évitez la moutarde qui appartient à la famille des Brassicacées ou la vesce qui est de la famille des Fabacées, deux familles dont on plante beaucoup de variétés au potager, et dont certains parasites pourraient nicher dans le sol. On cherche à ce que la terre ne soit presque jamais à nue… On peut aussi mettre du compost et/ou fumier sous le foin, en particulier sur les futures bandes de légumes gourmands en azote.

Au printemps

Au printemps, ne bêchez surtout pas, ne retournez pas la terre, vous détruiriez tout le fabuleux travail des vers de terre anéciques (qui aèrent le sol) et bactéries (qui transforment l’azote de l’air en nitrate et ammonium dont se nourrissent les plantes).

Avant de semer / planter vos légumes, il y a deux écoles:

  • Ceux qui ne font rien du tout, aucun travail du sol, comme Didier Helmstetter “Le Potager Paresseux”,
  • Ceux qui optent tout de même pour un petit coup de grelinette, afin d’aérer le sol en profondeur, et de croc, pour ameublir la terre en surface. Je suis plutôt de cette école… Aussi j’ai l’impression que ça embête un peu les mulots ou campagnols qui auraient fait leurs nids par là.

Aussi, certains dépaillent le potager au printemps (avril) pour réchauffer le sol plus rapidement avant la grande phase de repiquage de mai. Cela peut aider à limiter les limaces. Je mets alors le paillage dans les allées.

Certains sèment des épinards sur les allées et en font un mulch (le coucher en marchant dessus mais pas couper), cela va nourrir le sol et les limaces iront plutôt manger ces plantes faibles plutôt que les plants en pleine forme à côté. J’ai lu cette technique dans le livre “Le poireau préfère les fraises” mais je ne l’ai jamais vu appliquée… J’ai essayé, mais je trouve les épinards bien capricieux. Ça n’a rien donné pour moi!

Pour les + curieux

Ce que j’ai principalement retenu de ma lecture du “Jardin Paresseux” de Didier Helmstetter :

Le sol est la partie qui se trouve sous nos pieds juste avant la lithosphère (roche). Elle ne fait en moyenne que 2 mètres de profondeur. Donnée assez étonnante, ce sol est en fait principalement composé de 95 à 98% de minéraux (que l’on appelle argiles, limons, sables en fonction de la granulométrie). Donc seulement 2 à 5% du sol est en fait composé de matière organique (vivante ou en décomposition). Dans le potager, on cherche à avoir un pH équilibré, légèrement acide mais pas trop pour que les bactéries puissent s’y développer.

Les plantes ont besoin d’eau, de lumière et de CO2 pour fabriquer leurs propres glucides grâce à la photosynthèse. Elles ont aussi besoin d’azote pour croître et fabriquer leurs acides aminés (protéines et code génétique). Bien que l’air qui nous entoure soit composée à 80% d’azote, la plupart des plantes (sauf légumineuses) ne peuvent pas absorber directement l’azote de l’air. En effet, celui-ci est sous forme “N2”, c’est à dire deux atomes d’azote reliés, mais cette liaison est en fait une triple liaison très difficile à casser. Ce sont certaines bactéries présentes dans le sol qui réussissent à casser cette liaison et à transformer l’azote de l’air en ammonium NH4+ et nitrate NO3- absorbables par les plantes.

Pour effectuer la transformation, ces bactéries ont besoin d’air, c’est pourquoi il ne faut jamais enterrer un compost. En fonction de leur espèce, les bactéries préfèrent vivre plus ou moins en profondeur. Il ne faut pas remuer le sol car elles ne peuvent pas se déplacer d’elles-mêmes (seulement sur le dos des insectes). Lorsque l’on retourne un sol, elles mettent alors un certain temps pour retrouver un emplacement idéal.

Les bactéries se développement surtout autour des galeries des vers de terre car c’est là qu’elle peuvent avoir accès à l’azote gazeux. Il existe 3 grandes familles de vers de terre :

  • Les vers endogés : ils vivent en très grandes profondeurs et ne remontent jamais, peu actifs, pas intéressants dans notre histoire de potager.
  • Les vers épigés : tout le contraire, ils vivent en surface, ils sont très nombreux et se reproduisent très vites. Ce sont eux que l’on trouve dans les lombricomposteurs. Ils sont très utiles pour la décomposition de notre compost de surface. Cependant, ils peuvent aussi représenté un problème car ils attirent les oiseaux qui viennent gratter sol du potager lorsque l’on travaille la terre avant de faire nos semis.
  • Les vers anéciques : ils vivent là où la températures est de 12°C avec un taux d’humidité qui leur va bien. Ce sont eux qui nous intéressent le plus car ils remontent la nuit en surface et creusent alors des galeries entre la surface et les profondeurs. Un indice de leur présence : les petits turricules de terre qu’ils laissent à la surface.

Les champignons, à travers le réseau mycorhizien, contribuent aussi à la l’absorption de l’azote et autres minéraux (tel le phosphore dont seulement 10% dans le sol sont directement assimilable par les plantes sans l’aide des champignons). Ils sont moins rapides que les bactéries, mais plus forts. Ils sont par exemple les seuls à pouvoir décomposer la lignine du bois ou encore la subérine de l’écorce. Tout comme les bactéries, ils ont aussi besoin d’air pour pouvoir travailler, plus exactement d’oxygène. De plus, ils permettent à la plante de mieux s’hydrater. En effet les champignons ont un très fort pouvoir de rétention et succion de l’eau équivalent à une centaine de bars (là où les plantes sont plutôt aux alentours de 15 à 16 bars). C’est pourquoi il est si important de n’utiliser aucun fongicide au potager (qui sont pourtant autorisé en culture “bio”, tel le sulfate de cuivre ou la bouillie bordelaise) et de bien les chouchouter en ayant un sol légèrement acide et non bêché. À noter qu’il s’agit d’une symbiose, les champignons bénéficiant aussi des plantes desquelles ils récupèrent certains nutriments.

Quelques bases de chimie :

Le cycle de l’azote
Le processus d’eutrophisation
Le cycle du carbone
Le cycle du phosphore
Série “NPK & Oligos” d’Antoine le potagiste
Mycorhize, la symbiose plante-champignon
Film “La révolution du vivant” (1h15)

COURS EN LIBRE ACCÈS
(Très complet, mais attention, ça devient aussi très technique !)

Fonctionnement Biologique des Sols par le très connu Marc-André Selosse (6h40)
Réseau de paysans-chercheurs “Maraîchage sur Sol Vivant” (12h)
Retour en haut